Bienvenue sur le blog de Jouons le Jeu !

Jouons le Jeu ! est une asbl dont le but est de faire découvrir plusieurs loisirs encore mal connus aujourd'hui : les jeux de figurines, les jeux de plateaux et les jeux de rôles. Nous essayons de propager cette passion durant nos séances de jeu (tous les 2e et 4e samedis du mois, rue du Docteur Liénard à Jemappes - Belgique) et par le biais de ce blog où nous relatons nos parties, testons nos jeux et discutons de choses ludiques !

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jeudi 30 juin 2011

"Sweet Agatha" : Un jeu pas comme les autres.

Au détour des rayons virtuels de mon magasin online préféré, je suis tombé sur un jeu dont le titre et la couverture m’ont de suite intrigué: « Sweet Agatha ». Etrange nom pour un jeu. Il n’en fallait pas plus pour que je me décide et que je le commande dans la foulée.

L’histoire
Agatha, votre amie, a disparu sans laisser de trace après une soirée passée en votre compagnie. Vous êtes donc la dernière personne à l’avoir vue et la personne la plus à même de l’aider et de la retrouver. A vous donc de mener l’enquête, de fouiller dans l’étrange personnalité de cette personne que vous appréciez. A vous de remonter les pistes laissées ça et là dans le capharnaüm de son appartement et de sa vie. Saurez-vous la retrouver ? Découvrirez-vous ce qui lui est arrivé ?

Présentation et matériel
Lorsqu’on a le jeu en main pour la première fois, on comprend de suite pourquoi l’éditeur s’appelle « La boite à Heuhh ». En effet, la première chose qui vient à l’esprit lorsqu’on se trouve face à ce matériel assez surprenant est « Heuhh… ».

Tout est présenté dans une enveloppe blanche du plus bel effet, illustrée d’une photo en couleur de celle qu’on imagine être la fameuse « Sweet Agatha » et d’un message codé. A l’intérieur, seul un petit livret couleur de 18 pages et un feuillet noir et blanc sont présents. Le feuillet reprend l’ensemble des règles tandis que le livret constitue le jeu en lui-même. Imprimé en couleur sur papier glacé, il est illustré d’images intrigantes, de symboles et d’indices à découper qui vous serviront au cours du jeu à mener l’enquête.

Fortement atypique, ce matériel de jeu surprend par sa qualité et ne donne qu’une envie: se plonger plus en avant dans cette aventure unique.

Règles et fonctionnement
Encore une fois, on pousse un « Heuhh… » d’étonnement voire d’incompréhension lorsque l’on aborde les (très) succinctes règles du jeu. A la première lecture, il est, je pense, totalement normal et légitime de se sentir largué, perdu, démuni face au jeu mais l’intérêt suscité par cet ouvrage nous pousse néanmoins à franchir le pas, à persévérer.

Cette minime persévérance sera récompensée immédiatement après l’ouverture du livret de jeu. Avec ses textes intriguant, ses illustrations captivantes et ses codes cryptés hypnotisants, celui-ci vous plonge au cœur de l’intrigue et fait naître bon nombre d’interrogations qui constituent l’unique base du jeu qui va suivre.

Les deux joueurs prenant part à l’enquête vont se répartir les deux rôles disponibles : le Lecteur et la Vérité (ces rôles pouvant être changé à chaque scène). Le Lecteur sera le personnage principal de l’histoire, l’ami qui recherche Agatha, tandis que la Vérité sera le monde alentour, celui qui gère les indices (découpés dans le livret) à insérer au cours des scènes.

De ce mécanisme très simple va se démarrer une construction narrative en 10 scènes basée sur les éléments fournis par le livret et sur les indices introduits par la Vérité. A chaque scène le joueur déterminera l’objectif de la scène (par exemple : fouiller l’appartement d’Agatha à la recherche d’indice, découvrir pourquoi Agatha se rendait régulièrement au bois, …) en fonction de l’évolution de l’enquête tandis que la Vérité introduira 3 nouveaux indices.

S’agissant d’un « jeu » coopératif, la Vérité prend soin de sélectionner des indices ayant un intérêt pour la construction de l’enquête et ne les choisis pas pour tenter de « bloquer » le Lecteur.

Le jeu s’arrête à l’issue de la 10eme scène qui doit impérativement apporter une conclusion à l’enquête. Agatha est-elle partie s’installer en Amérique latine, a-t’elle été tuée, a-t’elle été enlevée, … Seule la construction libre de l’enquête par la Vérité et le Lecteur peut déterminer l’issue de l’histoire.


Impressions
Que ce soit lors de la découverte, du déballage ou de la partie en elle-même, ce jeu attise la curiosité des joueurs. On se sent vraiment perdu au début mais ce sentiment se dissipe rapidement lorsqu’on entame la partie. On va et vient alors entre les pages du livret observant les détails, tentant d'établir un quelconque lien entre les illustrations, morceaux de texte et autres cryptogrammes. Plus les indices s’ajoutent au jeu, plus on s’efforce de faire évoluer son histoire, son enquête, afin de les intégrer « correctement » pour construire un récit cohérent et complet.

Même si je ne placerais pas ce jeu dans ma ludothèque idéale et si j'ai un peu (beaucoup) galéré (surtout au début), j’ai pris plaisir à y jouer mais doute cependant de sa rejouabilité… En effet, on ne peut malheureusement pas répéter l’enquête à l’infini car tôt ou tard on se laissera influencer par soi même en utilisant son expérience de la première partie pour se forcer à aller dans une autre direction ou pour reprendre des chemins que l’on avait particulièrement apprécié…

Conclusions
« Sweet Agatha » est-il réellement un jeu ? C’est la première question qui me vient à l’esprit à l’issue de la partie… Ais-je réellement « joué » durant le temps que m’a pris cette enquête ? D’un coté, oui. J’ai joué à construire une enquête, un récit, en collaboration avec un autre joueur. D’un autre coté, non. Je n’ai fait qu’inventer une histoire avec une autre personne comme le feraient deux scénaristes planifiant leur prochain film sans réelle notion ludique au sens classique du terme.

« Classique ». C’est bien sur cet axe là que Sweet Agatha se démarque de tout ce qui existe actuellement. Ce jeu n’a rien de classique, rien de connu. N’y cherchez pas de plateau de jeu, de cartes, de pions, de marqueurs vous n’y trouverez rien. Vous êtes lâchés avec pour seul matériel un livret et quelques indices. Tout dans ce jeu est neuf et novateur. C’est une expérience particulière, à mille lieux de tout autre jeu d’ambiance auquel on pourrait le rapprocher. Même une référence comme « Petits meurtres et Faits divers », avec qui ce jeu partage quelques points de convergence (pour sa manière d’intégrer des éléments dans une histoire en pleine évolution) en est totalement différent par sa gestion évolutive d'une histoire dont le développement est impératif, par son absence de timing à respecter, par son absence de compétition entre joueurs, ...

Sweet Agatha est bel et bien un ovni dans l’univers ludique. Ni jeu de rôle, ni jeu de société, encore moins exercice d’écriture ou d’improvisation, il est clairement indéfinissable mais situé au confluent de toutes ces activités. Pas étonnant donc qu'il ait obtenu le prix Indie RPG 2009 du "Jeu le plus innovant". Ce jeu est une réelle expérience ludique, quelque chose à tester absolument.


Sweet Agatha
Edité par « La boite à Heuhh »
Pour 1 ou 2 joueurs (idéalement 2)
15 €

Le site de l’éditeur : http://www.bah-editions.fr/
(Vous y trouverez des indices à imprimer pour ne pas découper le joli livret du jeu)

dimanche 26 juin 2011

Olympos : Présentation et test

Il semble que depuis quelques temps, nous avons délaissé le blog, et ce pour diverses raisons qui ont fait  des deux derniers mois une période de préoccupations, pour ma part du moins, malheureusement moins ludiques. Au nom de toute l’ASBL Jouons le Jeu !, nous nous excusons auprès de nos lecteurs plus ou moins réguliers pour cette absence. Mais pour se faire pardonner, nous vous offrons un humble test d’Olympos, le dernier blockbuster d’Ystari Games !



I.                    Présentation du jeu et du contenu

« Il fut un âge où les dieux vivaient en harmonie avec les hommes, un âge lointain et oublié de tous où les hommes partageaient le nectar sacré de ceux qu’ils vénèrent aujourd’hui. Mais peu à peu, les dieux, honteux de la nature humaine, s’éloignèrent de leur création et se réfugièrent au sommet de l’Olympe, où jamais quiconque ne pourrait les atteindre, laissant ainsi les hommes se disputer dans le sang et les pleurs les ressources que les dieux eux-mêmes leur avaient offert. Ainsi fut révolu l’Âge d’or de l’humanité. »

C’est dans cette ambiance que s’inscrit Olympos, le dernier jeu de Philippe Keyaerts, auteur de jeux à succès tels que Smallworld ou Evo, édité par Ystari Games, reconnu pour ses jeux dits « à l’allemande ». Et Olympos n’échappe pas à la règle. Dès l’ouverture de la boîte magnifiquement illustrée, on retrouve le cheval de bataille d’Ystari : le pion en bois. Mais pas seulement ! On retrouve également de nombreux pions en carton représentant les ressources, des cartes elles aussi très joliment illustrées (félicitations à Arnaud Demaegd pour son travail), des tuiles de développements et leur plateau, un livret de règles et, bien sûr, un plateau représentant la Grèce et ses îles, parmi lesquelles l’Atlantide, encore non immergée.

II.                  Les règles

Qui dit première partie dit logiquement explication de règles, un moment qui peut s’avérer parfois être un moment de profonde réflexion personnelle donnant lieu à des exclamations telles que « Suis-je donc trop intelligent pour comprendre ? ». Mais pas dans Olympos ma bonne dame ! Les douze pages de règles sont rapidement assimilées et n’ont, durant cette partie, jamais été un obstacle. Et pour citer Monsieur D’Ystari dans la Tric Trac Tv sur Olympos : « La richesse est ailleurs »

III.                Le déroulement de la partie

Après avoir préparé les deux plateaux de jeu, aléatoirement disposé les tuiles développement, choisi quels territoires seront inaccessible pour la partie, reçu des ressources de base, les joueurs vont se lancer à la conquête de la Grèce. Venus du nord, les colons vont s’installer de par le plateau et, une fois leur première colonie créée, les joueurs auront le choix entre une des deux actions qu’il est possible d’effectuer par tout : l’expansion (sur des territoires vides ou adverses) ou le développement, chaque action ayant un coût en temps. Une fois son action terminée, le joueur avance son pion sur l’échelle de temps et c’est au tour du joueur situé le moins loin sur cette échelle de jouer.

Une fois que les joueurs auront récupéré des ressources sur le plateau ou grâce aux cartes, ils seront aptes à se développer en achetant pour un certain nombre de ressources des tuiles du plateau développement. Ces développements apportent deux avantages : tout d’abord, l’effet de la tuile soit applicable immédiatement soit sur le long terme, mais aussi un autre effet immédiat tel que gagner du temps, des colons, de la piété, etc.

Comme dans les tragédies de Sophocle, les dieux influencent le destin des hommes et cette influence, positive ou négative, serait représenté par des cases sur l’échelle de temps qui, une fois atteinte, déclencheront l’effet d’une carte « Olympos ». Les effets de ces cartes affecteront les joueurs selon comment ils adorent les dieux, les moins pieux subissant les foudres de Zeus, les plus pieux étant récompensés.

La partie s’achève lorsque tous les joueurs ont dépassé la dernière case « Zeus ». Ils ont alors droit, s’ils le souhaitent, d’effectuer une dernière action, mais plus leur position s’approchera de la fin de la piste de temps, moins ils marqueront de points sur celle-ci.

IV.                Critique

Ma première réflexion une fois la partie terminée (et gagnée, soit dit en passant) fut que le buzz autour d’Olympos était plus que justifié. La piste de temps, bien que déjà présente dans des jeux tels que Thèbes, rend selon moi de la manière possible la pression du temps qui passe. On se retrouve rapidement à s’étonner d’être déjà arrivé à la moitié de la piste. D’autant plus que cette piste de temps ajoute une certaine fluidité au jeu, qui ne connaît aucun temps mort et je ne me suis pour ma part pas embêté une seule minute pendant le tour d’un de mes adversaires. Et a fortiori puisque les actions des autres joueurs vont conditionner votre tour de jeu. Il est tout simplement impossible d’ignorer les autres joueurs pour se développer en autarcie. Cependant, les combats ne sont pas omniprésents et leur simplicité n’alourdit en rien le système de jeu.

Dans Olympos, il vous faudra prévoir une stratégie à long terme, mais il vous faudra aussi savoir faire preuve d’opportunisme et saisir les occasions qui s’ouvrent à vous, tout en s’adaptant aux actions de vos adversaires. Il me semble, cependant, comme nombre de jeux « à l’allemande », que plusieurs parties sont nécessaires pour pouvoir en comprendre toutes les subtilités. Et c’est certainement en cela que se trouve la « richesse » qu’évoquait Monsieur d’Ystari.

A moins que ce ne soit sa durée de vie. En effet, avec les tuiles développement disposées au hasard et les territoires déclarés inaccessibles en début de partie, Olympos s’offre une « rejouabilité » impressionnante et, croyez-moi, il n’est pas prêt de prendre la poussière au fond d’une armoire !